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Fiche Compétences Chercheur

Matthieu LETT

Domaines : Sciences humaines et sociales
Ref. Fiche : CVC855

Principaux domaines de compétences

  • La peinture en France sous le règne de Louis XIV.
  • Production artistique dans les cours européennes (XVIIe-XVIIIe siècle), principalement France, Espagne et Saint-Empire romain germanique.
  • Rapports entre décor et architecture.
  • Versailles et les résidences princières européennes.
  • Usages et pratiques de la miniature à l’époque moderne.
  • Débats artistiques à la Révolution.
  • Représentation des institutions des anciennes provinces françaises 1600-1789.

Exemples de Réalisations

Thèse : Les escaliers d’honneur dans l’Europe des princes (1670-1760) : Architecture et décor d’une pièce d’apparat

À partir du xvie siècle, les escaliers d’honneur devinrent des morceaux de bravoure, tant pour les maîtres d’œuvre que les maîtres d’ouvrage. Ils constituaient aussi des espaces importants dans le cérémonial européen, car ils permettaient d’exprimer, lors de l’accueil de représentants de délégations étrangères, des différences de rang selon que ceux-ci étaient reçus, avant l’audience, au bas, au milieu ou au sommet de l’escalier. Ainsi, l’escalier faisait généralement l’objet d’une attention particulière non seulement dans son architecture, mais aussi dans son décor qui devait être somptueux tout en respectant la convenance. La fin du xviie siècle et la première moitié du xviiie siècle ont constitué un moment privilégié de la production des escaliers d’honneur en Europe, en raison notamment des rééquilibres politiques entraînés par la montée en puissance de la France de Louis XIV puis les guerres de succession d’Espagne (1701-1713), de Pologne (1733-1738) et d’Autriche (1740-1748).

À partir d’un corpus original d’une trentaine d’escaliers bâtis pour des princes souverains pendant cette période en Angleterre, en Espagne, en Italie, en France et surtout dans le Saint-Empire romain germanique, cet essai vise à mieux comprendre, à partir de sources en partie inédites, les contraintes et les enjeux qui ont présidé à leur production. Pour la première fois, l’escalier est abordé tant sur le plan de l’architecture que du décor dans une perspective européenne qui donne un éclairage nouveau sur la compétition somptuaire entre les cours à l’époque moderne. La question des modalités de l’expression de la magnificence princière et de la circulation des modèles est au cœur de cette étude qui met en évidence les spécificités des escaliers construits pour les souverains par rapport aux escaliers faits pour les particuliers.

Projet : Peindre en petit. La miniature comme art somptuaire dans l’Europe des cours (1600-1800) : pratiques, usages, circulations. Le cas de la France et de la Bavière.

Ce projet consiste à mener une étude comparée de l'art de la miniature (scènes mythologiques, allégoriques et historiques, portraits, paysages) à la cour de France et de Bavière aux XVIIe et aux XVIIIe siècles, non seulement sous l'angle de la production, mais aussi des usages et des modes de présentation, dans la perspective des échanges entre ces deux cours. Il s'agit de poser les fondements d'une étude plus ambitieuse qui sera élargie, à moyen terme, à l'échelle européenne. Quatre axes sont privilégiés, à savoir : 1. Les enjeux liés au petit format ; 2. Le statut des miniaturistes et la pratique de la miniature à la cour (commandes, genres, spécialisations, mobilités et milieu social des artistes) ; 3. La place de la miniature dans les résidences princières (collections, présentation des œuvres) ; 4. Les pratiques et les usages spécifiquement féminins de la miniature.

 

Projet : L’art et les institutions provinciales de Louis XIV à la Révolution. Architecture, urbanisme et production artistique publique dans les états de Bourgogne et en Franche-Comté

Ce projet, à la croisée de l’histoire de l’art, de l’histoire politique et de l’histoire des institutions, vise à étudier, à travers l’exemple de la Bourgogne et de la Franche-Comté, les différentes modalités de la production artistique publique, que ce soit l’architecture, l’urbanisme, les décors, les monuments, ou encore les festivités dans la France d’Ancien Régime. Quel était le rôle des institutions – municipales, fiscales (cours des comptes), judiciaires (parlements), représentatives (états, assemblées) – par rapport au pouvoir monarchique dans l’embellissement du territoire ou des villes et dans l’encouragement artistique ? Comment les institutions provinciales se représentaient-elles ? Comment fonctionnait la commande artistique publique ? Quels étaient les acteurs impliqués ? Ces questions permettent d’historiciser l’engagement des collectivités territoriales et de l’État dans l’encouragement des arts et les politiques d’aménagement.

Ces dernières décennies, l’histoire des institutions sous l’Ancien régime a connu un profond renouvellement historiographique qui a sensiblement modifié la perception que l’on avait de la réalité de l’exercice du pouvoir monarchique en France. Les pays d’états, libres de consentir à l’impôt, ont fait l’objet d’une attention particulière, ainsi que les cours souveraines (parlements, cours des comptes) et les représentants du pouvoir royal (intendants, gouverneurs). Il est désormais possible, grâce à ces travaux, d’ouvrir de nouvelles perspectives de recherche.

Alors que les historiens de l’art se sont essentiellement intéressés aux académies, il paraît pertinent de se concentrer désormais davantage sur les conditions de la production artistique publique, de la construction ou de l’embellissement d’édifices aux festivités en l’honneur des représentants du pouvoir, en passant par les aménagements urbains ou la frappe de jetons. En tenant ainsi compte de toute la diversité des rapports des institutions provinciales aux arts, il est possible de mieux comprendre comment les provinces se positionnaient par rapport au pouvoir monarchique sur le plan de la représentation et dans quelle mesure le roi contribuait à l’embellissement du royaume dans son ensemble. Le choix de se restreindre à la région Bourgogne Franche-Comté se justifie par la nécessité de dépouiller des sources de première main, ainsi que par l’intérêt de comparer un pays d’état à un pays conquis. Par ailleurs, la période qui va du règne de Louis XIV, avec la conquête de la Franche-Comté, jusqu’à la Révolution française qui marque la disparition des états de province, constitue un moment de renforcement de l’importance des institution provinciales. La fin du XVIIe et le XVIIIe siècle sont par ailleurs marqués par les nombreux embellissements entrepris dans l'ensemble des provinces françaises, que l’on peut en partie imputer directement aux institutions locales.

Plusieurs axes de réflexion sont privilégiés :

  1.  Les mécanismes de la commande artistique publique : prise de décision (le roi, les institutions provinciales) ; choix des artistes/architectes ; réseaux d'influence (cour)
  2. Construction et embellissements d’édifices publics, de monuments, aménagements urbains : études de cas 
  3. Enjeux de la représentation des institutions et des individus (intendants, gouverneurs) à travers l’étude de portraits, de vues d’assemblées, de festivités, etc.
  4. Les dispositifs publics d’encouragement des arts (écoles de dessin, académies, prix de Rome des états de Bourgogne).
  5. Différence entre les pays d’états (la Bourgogne), et les pays conquis (la Franche-Comté) dans leur rapport aux arts et à la commande publique

 

 

Projet : La célébration des Illustres en Europe (1580-1750) : vers un nouveau paradigme ?

Dans l’avertissement du second volume de ses Hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, avec leurs portraits au naturel (1696-1700), Charles Perrault se trouva contraint de justifier l’un des choix que lui et son protecteur, Michel Bégon, avaient défendus. On lui reprochait en effet « d’avoir meslé des artisans avec des princes et des cardinaux », c’est-à-dire d’avoir accordé la même gloire à des hommes de conditions très diverses. Cette critique – et la réponse de l’auteur, qui convoque les exemples canoniques d’Apelle et de Phidias, dont les noms « mis après celuy d’Alexandre mesme, ne font point de honte ny à Alexandre ny à son siècle » – permet de situer l’ouvrage de Perrault à contrepied de la tradition encomiastique qui se développa au XVIe siècle, dans le sillage des Vies parallèles de Plutarque. Selon cette tradition, seule la célébration des princes et des grands serviteurs de l’État était justifiée, dans une perspective politique, laquelle conduisait à écarter les lettrés, les savants et les artistes. Les entreprises picturales – telles que la galerie des Illustres du château de Beauregard, décorée de 327 portraits à partir de 1620, ou celle du palais Cardinal à Paris commandée en 1632 par Richelieu – s’inscrivent ainsi encore dans cette tradition. Il en est de même des recueils gravés, tels la série des portraits de Thomas de Leu, ou encore des biographies de femmes illustres, comme Les Harangues héroïques de Madeleine de Scudéry (1642-1644) ou la Gallerie des femmes fortes du jésuite Pierre Le Moyne (1647), toutes deux exclusivement consacrées aux dirigeantes et aux grandes héroïnes de l’histoire ancienne.

Les lettrés et les artistes pouvaient bien sûr faire l’objet de vies autonomes ou incluses au sein de séries leur étant exclusivement consacrées. Ainsi, au XVIIe siècle, à la suite des Vite de Vasari, les artistes furent représentés dans diverses « galeries » réelles ou fictives, allant de la collection d’autoportraits d’artistes de Léopold de Médicis poursuivie par le grand-duc de Toscane Cosme III, aux recueils biographiques comme le Gulden Cabinet van de Vry Schilder-Const de Cornelis de Bie (1662). Cependant, si de telles entreprises témoignent bien de l’élévation du statut des peintres et des sculpteurs, elles demeurent en grande partie distinctes des pratiques de célébration des grands hommes d’État. Aussi une hiérarchie implicite subsiste-t-elle clairement, comme en témoignent encore les critiques formulées à l’encontre du projet de Perrault.

Or, au siècle suivant, un Voltaire pouvait au contraire affirmer que ceux qui “ont excellé dans l’utile ou dans l’agréable”, c’est-à-dire précisément les savants et les artistes, constituaient les véritables exempla virtutis : ils étaient alors susceptibles de surpasser en mérite les héros militaires, pour compter parmi les premiers des grands hommes. Comment s’est opéré ce changement de paradigme, dont l’ouvrage de Perrault constituerait alors l’un des rouages les plus connus, entre 1580 et 1750 ? La France de Louis XIV apparaît a priori comme un catalyseur par le renouvellement des modes de célébration de la gloire royale et surtout par l’institutionnalisation des mondes des arts, des sciences et des lettres sous le ministère de Colbert, phénomènes qui donnèrent lieu à l’élaboration de nouveaux corps sociaux structurés, assortis de nouveaux types de discours visant à soutenir leur légitimité. Cependant, à l’instar des Vrais pourtraits et vies des hommes illustres d’André Thevet (1584) ou des Icones Principum Virorum de Van Dyck (1645), certaines entreprises antérieures à l’ouvrage de Perrault réunissaient déjà savants, artistes et hommes d’État sur un même plan. Ces quelques exemples doivent alors nous conduire à nuancer le rôle de pivot jusqu’alors attribué au règne de Louis XIV, pour tâcher de retracer plus finement l’évolution des conditions sociales et intellectuelles qui ont permis l’émergence de nouveaux types de discours sur les Illustres.

Jusqu’à présent, l’historiographie s’est essentiellement attachée à explorer les enjeux de la biographie dans le contexte humaniste du XVIe siècle, largement marqué par le modèle de Plutarque (Dubois, 2001 ; Eichel-Lojkine, 2001), ou à l’inverse, au développement du culte des grands hommes après 1750 (Bonnet, 1998 ; Gaehtgens et Wedekind, dir., 2009). Ce projet se propose donc de revenir sur l’ensemble des productions biographiques d’une période jusqu’alors peu étudiée sous cet angle, afin de mieux comprendre comment se transformèrent, entre 1580 et 1750, les modes de célébration de la gloire des illustres, tant par l’écrit que par l’image, en tenant compte de l’ensemble des médiums que constituent le livre, l’estampe, la peinture, la sculpture ou encore la médaille.

En complèment

Mots clés complémentaires : Histoire de l’art ; histoire des cours ; XVIIe siècle ; XVIIIe siècle ; politique ; représentations.